Chaque seconde, près de 137 000 mégots se retrouvent au sol dans le monde. Ce flot continu contamine sols, rivières et océans, et pèse lourd sur les ressources en eau. Et si nous transformions ce problème en opportunité d’accélérer la transition écologique, ici et maintenant ?

Réduire à la source et protéger l’eau

Un seul mégot qui glisse dans un caniveau au lieu d’un cendrier peut altérer 500 litres d’eau, et les services municipaux de Paris en collectent 350 tonnes par an. À l’échelle planétaire, on estime qu’environ la moitié des mégots, soit 2 150 milliards par an, finissent dans les océans. En 2018, NBC News signalait le filtre comme premier polluant des mers, devant pailles et sacs. Gestes utiles dès aujourd’hui : cendrier de poche, tri dans des bornes dédiées, participation aux ramassages citoyens (objectif simple : 10 mégots/jour), et demande d’implantation de cendriers sur l’espace public et à proximité des lieux festifs. Pour aller plus loin, soutenons l’interdiction des filtres plastiques et des obligations de collecte auprès des producteurs.

Responsabilité des producteurs et économie circulaire

La chaîne de valeur du tabac dégrade fortement les écosystèmes : l’industrie est responsable de 5 pourcent de la déforestation mondiale, et 11 millions de tonnes de bois sont brûlés chaque année pour le séchage des feuilles ; un arbre est abattu pour fabriquer papier et emballage de 15 paquets.

Ce sont 200 000 hectares de forêt perdus annuellement. Par ailleurs, 90 pourcent des cigarettes produites, soit 5 400 milliards, proviennent de pays pauvres, où des enfants travaillent dans les champs et sont exposés au DDT et à d’autres substances interdites ailleurs.

Solutions : instaurer une responsabilité élargie du producteur avec objectifs de réduction des 4 300 milliards de mégots dispersés et des 680 000 tonnes de déchets, financer des filières de recyclage de l’acétate de cellulose et encourager l’éco-conception. Les collectivités peuvent déployer du mobilier urbain adapté, et les entreprises proposer des points de collecte internes.

Comprendre la pollution invisible pour mieux agir

L’exposition à la fumée augmente le risque de cancer 57 fois plus que tout autre polluant atmosphérique courant, et un moteur contemporain au ralenti durant 30 minutes émet moins que 3 cigarettes consommées à la suite.

La combustion libère plus de 7 000 substances chimiques, dont une cinquantaine très toxiques, comme l’arsenic, mais aussi l’ammoniac, le benzène, le cadmium, le cyanure d’hydrogène, le formaldéhyde, le goudron, le monoxyde de carbone et l’oxyde d’azote.

Le filtre est composé d’acétate de cellulose (fibres traitées au dioxyde de titane et compactées à la triacétine) qui capture aussi plomb et mercure ; la majeure partie d’une cigarette se dégrade en 1 à 3 ans, l’acétate de cellulose en 10 ans, et le mégot disparaît en environ 12 ans — le temps que plus de 54 milliards d’autres soient jetés.

Côté empreinte hydrique, une étude de 2018 de l’Imperial College London estime qu’un fumeur à 1 paquet/jour pendant 50 ans mobilise 1,4 millions de litres d’eau. Agir : se faire accompagner pour réduire ou arrêter, privilégier des espaces sans tabac, et sensibiliser son entourage.

Chaque petite décision compte : jeter son mégot dans un cendrier, participer à une collecte, interpeller sa commune ou son entreprise, soutenir des politiques ambitieuses et des innovations de recyclage. Ensemble, nous pouvons protéger l’eau, la biodiversité et le climat, et prouver qu’un geste durable répété des millions de fois change véritablement la donne.